Quand les techniciens de maintenance interviennent, ils peuvent être accompagnés d’un ingénieur droniste, qui détecte les défauts. Cela évite aux techniciens cordistes de prendre des risques. Crédit : Grégoire Chalony
Mais où sont les techniciens de maintenance sur éolienne ? « 80 sont formés en France chaque année, alors que les besoins sont de 300 », déplore David Maïka, enseignant au lycée Bazin à Charleville-Mézières. Le lycée propose deux formations pour devenir technicien de maintenance sur éolienne. Sur un effectif pouvant compter une trentaine d’étudiants, il n’y a que 16 inscrits. « Ça fait trois ans qu’on a de plus en plus de mal à recruter » note Sonia Cart, responsable des BTS du lycée.
Constat partagé par le lycée Claude Chappe au Mans : « C’était correct ces dernières années, mais pas pour 2023-2024. » Johanne Alleaume est responsable au lycée Descartes-Maupassant de Fécamp, où la formation ne compte que neuf étudiants. Le plus dur est de les garder à bord : « On a des étudiants qui démissionnent assez rapidement dans l’année, et tout au long de la formation. » Ils ne sont que cinq à avoir obtenu leur BTS l’année dernière.
Une formation complexe
Les techniciens de maintenance ont pour mission de dépanner, réparer et améliorer les équipements éoliens, en intervenant régulièrement dans les parcs. Ils doivent aussi anticiper et éviter les dysfonctionnements, qu’ils soient de nature électrique ou mécanique. « Certains étudiants se découvrent le vertige au passage de l’habilitation nécessaire pour faire la formation », confie Johanne. Sonia Cart du Lycée Bazin souligne, elle, l’aspect physique et les nombreuses compétences à développer : « Ils sont formés à être Sauveteur Secouriste du Travail (SST), à la gestion d’incendie, de survie en mer, en plus des compétences de bases en hydraulique, mécanique… »
Pour autant, il est difficile d’affirmer qu’il s’agit là d’une explication au manque de candidats : « Si on est intéressé, c’est assez simple », affirme même Vincent Albert, qui sort tout juste du BTS Maintenance des systèmes Option C de Charleville-Mézières. Pour expliquer ces difficultés, les lycées, eux, évoquent l’épidémie de Covid-19 ou la méconnaissance de l’offre de formation. Sonia Cart souligne les tergiversations de l’État : « À l’été 2021, on nous faisait plutôt croire qu’on allait démanteler des parcs, j’ai cru devoir fermer le BTS. (…) Finalement, il y a eu rétropédalage, mais médiatiquement, l’éolien a pris un coup. »
Des postes en nombre à pourvoir sur tout le territoire
Résultat, dans les entreprises, on manque de personnel : « On est des équipes de 24 à 28 techniciens par parc éolien. Il faudrait doubler les effectifs », déclare Guillaume Hervochon, employé chez Siemens-Gamesa, entreprise de maintenance. « On manque de formation dans l’éolien, alors que les recruteurs ont justement besoin de personnes issues de ces formations » complète-t-il. Grégoire Chalony pilote des drones chez Cornis pour identifier les défauts des éoliennes et les transmettre aux entreprises de maintenance. : « On est que trois techniciens, concède l’ingénieur de formation. On met 6 mois à en trouver, et on doit les former en cours de route. »

Dans son Observatoire de l’Éolien 2023, France Renouvelables (anciennement France Énergie Éolienne), comptabilise 416 postes de techniciens de maintenance à pourvoir sur le territoire, alors que « deux tiers des entreprises envisagent de recruter davantage ». De plus, d’après ce même rapport, c’est dans la maintenance que le nombre d’emplois croît le moins vite.
L’essor de l’offshore : d’autres freins pour les techniciens
Depuis mai 2023, Guillaume est passé de la terre à la mer : il est technicien de maintenance éolienne offshore sur le parc de Fécamp. « J’ai dû passer trois ou quatre entretiens : test d’anglais, physico-médical, psychologique… Les critères de sélection sont nombreux » avance-t-il. C’est aussi un métier aux conditions difficiles : « Le risque est présent quasiment en permanence, poursuit Guillaume. Même si nous sommes formés et que les inspections sont nombreuses, si t’es au mauvais endroit au mauvais moment… » De quoi en refroidir certains.
Grégoire, le droniste, a souvent rencontré des techniciens offshore : « C’est un métier difficile, très intense. Ils peuvent être bloqués pendant deux semaines en mer, et dormir dans des bateaux-hôtels sur les parcs offshores. » Et quand les mainteneurs peuvent revenir à terre, « c’est départ à 6 h du matin, retour à 20 h » conclut l’ingénieur de formation. Pour autant, Guillaume aime son métier : « Dans mon équipe, personne ne se plaint de venir à 5 ou 6 h du matin. On ne vient pas à reculons au boulot le matin. »
Éoliennes : Qui fait quoi ?
Pour comprendre l’éolien, il faut distinguer trois acteurs : les constructeurs, les mainteneurs et les exploitants. Les constructeurs sont Vestas, Nordex, ou Enercon : ces entreprises s’occupent de fabriquer turbines et pales, comme au chantier de l’Atlantique à Saint-Nazaire. Les exploitants comme EDF, Engie ou Boralex s’occupent de la production et diffusion d’énergie. Parfois, ils font appel aux constructeurs pour gérer la maintenance, mais souvent, ils sous-traitent à des sociétés comme Siemens-Gamesa. Il arrive que l’exploitant ne fasse pas confiance aux mainteneurs, et organise de nouvelles interventions, en interne cette fois-ci.